Le coordonnateur général du Centre de Recherche en Finances Publiques et Développement Local (CREFDL), Valery Madianga a exprimé ses préoccupations concernant l’absence de crédibilité budgétaire et de transparence des marchés publics effectués dans le cadre du processus électoral du 20 décembre 2023. Il a partagé ses observations lors de son intervention à l'atelier d'analyse et d'évaluation des élections présidentielle, législatives nationales et provinciales, ainsi que des conseillers communaux, qui a eu lieu le mercredi 6 mars 2024, dans la Salle Kundelungu du bâtiment administratif du ministère de l'Intérieur, situé sur le Boulevard Triomphal à Kinshasa.
Invité par la plateforme Agir pour des Elections Transparentes et Apaisées (AETA), une Plate-forme des ONG de la Société Civile dotée de la personnalité juridique, Valéry Madianga, expert en suivi et contrôle budgétaire, a pris la parole comme sixième intervenant lors de l'analyse et l'évaluation, ayant pour thème général "Renforcement du caractère démocratique et apaisé des opérations du processus électoral 2022-2027". Le Coordinateur du CREFDL un exposé sur la question de la "crédibilité budgétaire et transparence des marchés publics".
Faits constatés
L'analyse comparative des fonds alloués aux opérations électorales en République démocratique du Congo, présentée par le CREFDL, soulève des doutes quant à la fiabilité des prévisions établies par la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI). Ce, en raison de l'absence d'un débat public au Parlement et du contrôle exercé par la Cour des Comptes.
Concernant la gestion budgétaire, Valéry Madianga a souligné que l’étude a constaté que les dépenses de la CENI ont enregistré une augmentation de 25,1% entre les deux cycles électoraux. De décembre 2021 à novembre 2023, le gouvernement a versé 1 091 479 898 $ à la CENI pour financer les opérations électorales. Par ailleurs, les fonds de la CENI ont été gardés dans des banques commerciales en lieu et place de la Banque Centrale du Congo, échappant ainsi au contrôle interne.
L’étude du CREFDL démontre aussi l’accroissement des effectifs du personnel de la CENI, qui est passé de 1 369 en 2020, sous la présidence de Corneille Naanga à 3 240 en 2022, après l'entrée en fonction du bureau actuel, ce qui représente une augmentation de 1 871 agents (soit 57,7%). "Le circuit de la dépense publique ne fonctionne pas. Les fonds publics sont toujours mis à sa disposition par des mécanismes opaques, notamment sans l'émission en amont des bons d'engagement, de la liquidation, de l'ordonnancement ni l'émission des OPI", a déclaré Valéry Madianga".
A propos de la passation des marchés avec les prestataires internationaux, Valéry Madianga a souligné l'opacité et le manque de transparence. Il a noté que les marchés publics étaient souvent attribués sans appel d'offres compétitif”. De plus, les contrats conclus avec les prestataires internationaux manquent souvent de clarté et de précision quant aux obligations et aux livrables attendus. Il a également mentionné des cas présumés de surfacturation et de corruption dans les contrats conclus.
Solutions envisagées
Concluant son exposé, Valéry Madianga a présenté plusieurs recommandations pour améliorer la crédibilité budgétaire et la transparence des marchés publics dans le processus électoral. Il a suggéré une plus grande implication du Parlement dans l'examen et l'approbation du budget alloué aux opérations électorales, ainsi qu'un contrôle renforcé de la Cour des Comptes. Le basculement du Budget de la CENI de moyen terme au budget-programme devrait être une priorité pour une gestion axée sur les résultats, a-t-il martelé.
Le Coordinateur du CREFDL a aussi invité les organisations de la société civile à réfléchir sur l’avenir de la CENI au regard de la mauvaise gestion des fonds qui se pérennise. S’agissant la passation des marchés publics, ce dernier a insisté sur l'implémentation du système intégré des marchés publics pour accroître la transparence des opérations électorales. Pour le CREFDL, la loi organique de la CENI doit être revisitée pour intégrer les mécanismes de transparence et de redevabilité financière, la lutte contre la corruption de l’agent électoral et le code de bonne conduite.
Le CREFDL a saisi l’occasion pour annoncer qu’elle prépare une note technique assortie des réformes importantes, qui seront versées au Parlement et à d’autres parties prenantes.
Christelle Nsimba